Depuis
1981 compris, tous les gouvernements sortants ont perdu les élections
législatives ou présidentielles, du moins si l’on considère que E Balladur a
perdu. En 1981, Giscard perd, en 86 c’est le tour de la gauche puis de Chirac
(premier ministre) en 88. La gauche au pouvoir reperd en 93, ainsi que Balladur
premier ministre en 95, la droite au pouvoir en 97 et enfin Jospin premier
ministre en 2002.
Il
est tentant de conclure à la victoire probable de Ségolène Royal puis de la
gauche en 2007. Bayrou et Sarkozy ont, en partie pour cette raison, essayé de
donner le sentiment d’être dans l’opposition et de jouer le coup de Giscard
(l’homme du « oui mais ») en 1974 ou de Chirac (la fracture sociale)
en 1995. Mais N Sarkozy ne peut cacher qu’il a tenu de grandes responsabilités
depuis 2005. Alors ?
Il
serait pourtant prudent de s’interroger sur les raisons de l’échec des
sortants. Il y en a une assez évidente : leur bilan n’était pas bon. Ou
plus exactement (et cela a été l’erreur du candidat Jospin), la situation,
économique en particulier, n’était pas bonne au moment du scrutin. Un examen de
l’évolution du chômage au moment des votes donne un éclairage utile
En
mars 1981, le pays compte 1, 695 millions de chômeurs, soit 228 milliers de
plus qu’un an auparavant et 490 milliers de plus qu’aux législatives de 1978.
A
mi 86, il y a 839 milliers de chômeurs de plus que 5 ans plus tôt. La reprise
de la création d’emploi à partir de fin 1985 n’a pas encore retourné la courbe
du chômage qui croît de 57 mille unités au premier semestre.
A
mi 88, le bilan du premier ministre sortant est apparemment bien
meilleur : en 2 ans, le chômage a enfin (légèrement) baissé (- 75 000),
essentiellement sur le premier semestre. Malgré tout, J Chirac perd. L’électorat
ne lui a pas pardonné certaines maladresses (la suppression de l’impôt sur la
fortune notamment) et la Tontonmania a fait le reste. Il est vrai que le
chômage est toujours à un niveau élevé (2.5 millions). La victoire de la gauche
est cependant très juste aux législatives.
A
mi 93, c’est de nouveau la gauche qui perd les législatives. Il faut dire que
le nombre de chômeurs a augmenté de 443 milliers sur 5 ans, dont 215 sur le
seul premier semestre 93 !
Le
bilan de Balladur semble également un peu meilleur en 95 : sur deux
ans le chômage ne baisse que de 50 mille unités mais cela se fait au début 95,
avec - 98 000 chômeurs sur le premier semestre. La situation économique
est encore médiocre. L’image de la gauche se redresse lentement est les
premiers sondages ne la voient pas au deuxième tour. Mais c’est Chirac qui
ramasse la mise.
En
97, de nouveau, le climat économique est au plus bas. Sur deux ans, le chômage
a encore augmenté de 282 000 et il dépasse les 3 millions. Le premier
semestre est dans la même ligné (+27 000). Alors que l’économie s’apprête
à rebondir fortement, Chirac dissout l’Assemblée.
En
2002, Jospin se présente aux électeurs très fier de son bilan : sur 5 ans,
grâce à la création de plus de 1.5 millions d’emplois, le nombre de chômeurs
n’a-t-il pas baissé de 700 000, revenant à 2,4 millions ? C’est vrai,
mais le mouvement s’est déjà inversé. Le bilan du premier semestre 2002 est de
49 000 chômeurs supplémentaires. Et la gauche n’a pas un bon bilan en ce
qui concerne la sécurité. Fidèle à ses convictions, elle pense que la
délinquance est le produit du chômage et donc que la baisse de ce dernier est
la meilleure lutte contre l’insécurité. Malheureusement pour elle, les
phénomènes en jeu sont à la fois plus compliqués et beaucoup plus lents. Les
crimes et délits ont fortement augmenté durant la législature, ce sur quoi
surfe Chirac et le Front National avec les résultats que l’on connaît.
Alors,
comment se présente 2007 ? A fin 2006, le chômage se situe un peu en
dessous du niveau atteint au début de la législature (- 99 000) et cela
s’est fait au dernier semestre (- 125 000) ce qui est favorable au
sortant.
Sur
ce front, le gouvernement s’était lourdement trompé au départ, avec des
prévisions de croissance à 3% (en conformité aux idées de l’époque) et l’idée
que le chômage étant amené à se résorber tout seul, il n’était pas nécessaire d’insister
sur les emplois aidés et qu’on pourrait progressivement les réduire. La loi
Fillon sur les retraites crée un courant de départ (pour ceux qui ont commencé
très jeunes) et prévoit une réduction des préretraites. En réalité, la
croissance n’est pas au rendez vous les premières années, et quand elle se met
à repartir, c’est à un rythme plus lent que chez les voisins. Le nombre de chômeurs
atteint un pic à 2,762 millions au premier trimestre 2005 au bon moment pour
contribuer à la victoire du non. Depuis, il a baissé de prés de 400 000 unités,
par la conjugaison d’une relance des emplois aidés et de créations d’emplois un
peu plus dynamiques. La croissance a beau être plus faible que celle de nos
voisins, elle devrait continuer à créer des emplois.
Les
élections se situent donc pour le camp sortant à un moment nettement plus favorable
que toutes celles qui l’ont précédé depuis 25 ans. Cela sera t’il suffisant
pour l’empêcher de perdre ?
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