Le bras de fer entre le nouveau gouvernement grec et ses créanciers européens s’est déjà transformé en une bataille de communication éminemment politique, chaque camp, à travers ses communiqués, prenant à témoin l’opinion publique de son bon droit. Le temps joue pour l’instant contre le gouvernement grec, qui pensait disposer d’une plus grande latitude dans ce domaine.
Le nouveau gouvernement a logiquement dégainé le premier
« Je suis la voix du peuple, élu démocratiquement. Pas question de nous laisser imposer notre politique économique par une troïka de technocrates étrangers qui nous impose une politique d’austérité, à la fois antisociale et contre-productive car elle provoque la récession. »
Et le gouvernement de prendre des mesures en interne, à la fois symboliques socialement et sensée contribuer à une reprise keynésienne : réembauche des femmes de ménage du ministère de l’intérieur, augmentation du SMIC et du seuil minimum d’imposition, remise en cause du report de l’âge de la retraite imposé précédemment etc. Et en externe, après le refus de négocier avec la troïka la dernière tranche (7 milliards d’euros), de commencer une tournée de tous ses partenaires.
La réponse est venue de la BCE, dans une intervention que l’on peut traduire ci-dessous :
« Vous ne voulez pas de notre aide si elle est conditionnée. C’est noté. Mais ne venez pas la chercher en catimini par l’intermédiaire de vos banques ».
La BCE a donc supprimé l’une des deux facilités qu’elle faisait par exception aux banques grecques, en les ramenant ainsi au doit commun fait à toutes les autres banques de la zone.
Le message subliminal est clair
« Les réformes que l’on vous impose, ne sont que des conditions à une aide que l’on vous accorde, et que vous êtes bien contents de trouver »
Le gouvernement a répondu à son tour en réclamant 1.9 des 7 milliards qui correspondent aux intérêts accumulés par la BCE depuis 2010 sur les obligations grecques ;
Bien sûr, là aussi, il y a un message à destination de l’opinion : « vous vous faites de l’argent sur le dos de la Grèce ».
Le discours est cependant aà manier avec précaution, car derrière on comprend que la BCE était prête à faire un prêt à taux zéro à la Grèce, ce qui est bien un cadeau.
Par ailleurs, les gouvernements européens ont répété
« Nous sommes prêts à faire un effort sur votre dette, à la fois sur son volume et sur les taux d’intérêts pratiqués, ce qui représente un cadeau énorme, qui se chiffre en dizaines de milliards d’euros. Mais il faut nous le demander. Et zous n’accepterons que si vous géréz vos fiances de manière raisonnable : nous n’avons pas l’intention de verser une aide ad vitam eternam parce que vous dépensez plus que vos recettes »
L’enjeu, pour le gouvernement grec est de pouvoir continuer à se présenter comme le pauvre pressuré par des créanciers avides et insensibles à la misère qu’ils provoquent.
Pour ses partenaires dans l’UE, pour la BCE, l’enjeu est de faire comprendre à l’opinion publique qu’ils sont venus en aide à un pays proche de la faillite, qui ne trouvait plus personne prêt à lui prêter, qu’ils ont avancé des sommes énormes, et qu’ils demandent (et ont demandé) simplement à la Grèce de prendre des mesures pour revenir à l’équilibre.
On en est là. Mais le gouvernement grec, qui pensait avoir jusqu’à juin pour négocier avec les autres pays de l’UE, est confronté à une fuite de ses capitaux, à un rythme que la banque centrale d’Athènes refuse de communiquer mais qui évidemment se compte en milliards.
Car si Syriza a gagné les élections, c’est avec moins de 40% des voix : tous les grecs n’ont pas voté pour lui, loin de là. Et certains craignent une sortie de l’euro. Et il n’y a pas besoin d’être un méchant spéculateur international pour peser par ses décisions quotidiennes sur les finances du pays. Par exemple en faisant remplir sa cuve de fuel un peu plus tôt que d’habitude, pour ne pas devoir le payer beaucoup plus cher si le pays sort de l’Euro. Ou en attendant un peu pour toucher le chèque en euro que vous a envoyé un étranger pour réserver une place dans votre camping cet été. De son côté, l’allemand qui a l’habitude de venir tous les étés peut simplement être inquiet de la suite des événements et donc attendre avant de prendre une décision de réservation.
La question de la confiance dans la monnaie, les banques ou l’État grec ne semble pas encore posée de manière aigue, mais là aussi le gouvernement grec a intérêt à faire attention à sa communication !
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