La démarche lancée par le gouvernement a accouché d’une souris et ne permettra certainement pas de fermer le dossier. Les décisions semblent prises pour ne fâcher personne mais pourraient en fait fâcher tout le monde, que ce soit les partisans du traitement de la question par l’augmentation de la durée de cotisations ou ceux estimant qu’il était urgent de ne rien faire ou de faire payer les rches/ les entreprises
Au final, le gouvernement a décidé pour l’immédiat de « partager le coût entre les entreprises, les salariés et les retraités » et pour le long terme d’augmenter progressivement jusqu’à 43 ans la durée de cotisations à l’horizon 2035, l’opération débutant vers 2020.
Proteos analyse finement ces décisions et livre un jugement particulièrement sévère :La réforme des retraites la plus injuste de ces 30 dernières années . Etant généralement d’accord à 99.9 % avec lui sur la plupart des sujets, je ne vais pas le contester cette fois. Je voudrais cependant souligner, avant de passer à ce qui ne me plait pas, que le seul fait d’annoncer une augmentation de la durée de cotisations marque un tournant pour la gauche.
Depuis 1993 et la première réforme sur le retraites menées par Edouard Balladur, la gauche n’a cessé de critiquer la droite sur ce sujet. Alors que cette dernière renonçait à renforcer la capitalisation au détriment de la répartition comme elle en a caressé l’idée dans les années 90, la gauche restait sur un discours consistant soit à prétendre que le problème des retraites n’existait qu’en raison de la faible croissance et du chômage trop élevé, soit à proposer comme seule solution une taxation des riches ou des entreprises.
En mettant le place le Conseil d’Orientation des Retraites, Lionel Jospin a pris les moyens d’obliger les représentants des salariés à regarder la réalité en face, au moins partiellement (sous la pression syndicale, le COR a toujours fait des hypothèses à long terme irréalistes, sur le taux de chômage et le taux de croissance), mais il n’a pas été plus loin sur un sujet qu’il aurait bien du aborder s’il avait été élu en 2002, mais sur lequel les militants socialistes ont toujours pris leurs rêves pour des réalités.
Dans la foulée, les partis de gauche, FO et la CGT n’ont pas eu de mots assez durs contre la CFDT qui avait osé accepter en 2003 les mesures alignant la durée de cotisation des fonctionnaires sur celle du privé en échange de la prise en compte des carrières longues. Rappelons qu’avant cette réforme, un fonctionnaire ayant travaillé dès 14 ans partait en retraite à 60 ans après avoir cotisé 46 ans quand celui qui avait commencé à 22.5 ans partait lui aussi à 60 ans mais avec 37.5 ans de cotisations, les deux ayant un montant de pension égal à 70 % de leur dernier salaire (celui des 6 derniers mois). La réforme promettait au premier de partir à 56 ans après 42 ans de cotisation et au second de partir à 62.5 ans avec 40 ans de cotisation : de fait, ce n’était plus l’âge qui était le principal critère de choix de la date du départ mais bien la durée de cotisation.
Cette réforme que la gauche aurait du ardemment réclamer tant elle parait être de pure justice sociale, a coûté à la CFDT des dizaines de milliers d’adhérents et des injures multiples à gauche. Or les décisions de François Hollande et de Jean Marc Ayrault à leur arrivée au pouvoir (avec une mini réforme redonnant à ceux qui ont commencé à travailler avant 20 ans la possibilité de partir avant 62 a&ns mais au mieux à 60 ans) et aujourd’hui (avec une perspective d’augmentation de la durée de cotisations jusque 43 ans) valident complètement les choix faits à l’occasion de la réforme de 2003, puisqu’ils se mettent clairement dans sa continuité. Dont acte !
Cette remarque faite, on ne peut que regretter les décisions prises, sur trois aspects
· D’abord le choix du traitement du problème à court terme par une ponction financière, présentée comme répartie justement entre salariés, entreprise et retraités, alors que l’augmentation de la durée de cotisation a pour effet d’éviter une hausse des coûts, qu’il n’y a donc pas besoin de répartir
· Ensuite l’affirmation que la hausse prévue de la durée de cotisation à 43 ans d’ici 20.35 règle le problème à long terme alors qu’on sait très bien que ce ne sera pas le cas
· Enfin l’incapacité à seulement commencer à aborder la question des différentes entre régimes : là aussi, c’est un sujet très difficile, mais c’est aussi un problème de justice sociale et de qualité de vivre ensemble : ne seraient ce pas des questions que la gauche devrait s’honorer de vouloir traiter en priorité ?
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