Le rapport de Yannick Moreau sur l’équilibre des retraites propose notamment de désindexer les retraites de base de l’inflation pendant trois ans. La mesure prendrait la suite d’une décision similaire déjà prise pour les retraites complémentaires. Mais elle est inscrite depuis longtemps dans les travaux du COR, à la suite de la réforme Balladur qui supprimait l’indexation sur les salaires.
Avant la loi de 1993, les retraités bénéficiaient d’une revalorisation régulière de l’inflation en fonction de la hausse des salaires : ils étaient ainsi protégés de la hausse des prix, mais ils bénéficiaient au-delà de l’inflation des effets de la croissance sur le pouvoir d’achat. La conséquence était que le rapport entre le revenu d’un pensionné et le revenu d’un actif moyen restait à peu près stable quand le pensionné vieillissait.
Pour préserver l’équilibre des caisses de retraite, le premier ministre Edouard Balladur a modifié plusieurs règles avec quatre principales mesures (source Wikipédia) :
· La durée de cotisation pour une pension à taux plein passe progressivement de 150 trimestres à 160 trimestres (notons qu’avec les dernières réformes, ce qsera 166 trimestres pour ceux qui sont nés en 1955
· Les pensions sont calculées sur les 25 meilleures années de cotisation, au lieu des 10 meilleures. La mesure est mise en place progressivement avec effet complet en 2010.
· La création d’un fonds de solidarité vieillesse (FSV) chargé de financer les avantages non contributifs (minimum vieillesse, avantages familiaux4.…)
· Une indexation des pensions de retraite sur l’indice Insee des prix à la consommation, et non plus celui des salaires.
Wikipédia précise que « de fait, ce choix d’indexation était déjà pratiqué depuis 1987 ».
Une telle politique se fait bien sûr au détriment des retraités les plus âgés. On notera que ce mécanisme peut faire de certains d’entre eux des pauvres, puisque le seuil de pauvreté est calculé en fonction du revenu moyen (c’est 50 ou 60% selon les formules). Si le revenu moyen par unité de consommation se situe à 1000 € par mois, le seuil de pauvreté à 60% se situe à 600 €. Imaginons une situation d’inflation nulle conjuguée à une hausse moyenne des salaires de 1.5%. Une personne qui se retrouverait avec une pension de 660 € passerait en dessous du seuil de pauvreté au bout de 7 ans. A noter que la situation de notre pensionné peut s’améliorer au contraire s’il liquide sa pension alors qu’il a encore un enfant à charge : son niveau de vie augmentera quand le jeune volera de ses propres ailes.
Si on examine maintenant les travaux du COR, on constate que celui si fait souvent varier les gains de productivité dans ses scénarios. C’est logique depuis la loi Balladur : de plus forts gains de productivité augmentent les recettes des caisses mais n’affectent pas leurs dépenses en raison de la désindexation, donc produisent des scénarios plus favorables. Mais plus ces gains sont élevés, plus il y a de pauvres au sein de la population des retraités.
La plupart des organisations syndicales ne voulant pas entendre parler d’un relèvement de l’âge de la retraite, elles préfèrent s’illusionner sur les taux de croissance et s’attacher au scénario qui implique le moins de changement : celui avec les plus forts gains de productivité et le taux de chômage le plus faible. Mais bien entendu, elles ne précisent pas aux salariés que cela cache de fait une baisse du niveau relatif des pensions.
Les organisations syndicales et la gauche ayant freiné des quatre fers face à tous les projets de réforme, la situation des caisses , aggravée par une productivité qui ne progresse plus que très peu depuis 10 ans et par un chômage qui explose, est en train de devenir intenable. D’où les propositions de Y Moreau et le rapport qu’elle doit remettre cette semaine au gouvernement. Un rapport qui apparemment contiendrait une proposition de désindexation de quelques années, non plus par rapport aux salaires mais par rapport aux prix.
La perspective d’une baisse des pensions (non pas en nominal mais en pouvoir d’achat) se rapproche de plus en plus ! On peut même dire qu’elle est déjà là, car la désindexation par rapport aux prix a déjà été décidée pour les retraites complémentaires.
Les commentaires récents