Le Monde fait ce soir sa Une sur les chiffres du chômage qui « explosent ». En sous-titre, le quotidien du soir écrit une énormité : « 45 000 personnes se sont inscrites à Pôle emploi en octobre ». En réalité, il y a eu 620 300 nouvelles inscriptions en octobre, soit 14 fois plus que ce qu’écrit le journal, et qui est tout à fait symptomatique d’une incompréhension de la manière dont fonctionne le marché du travail.
Ces données sont brutes et concernent l’ensemble des catégories A, B et C. Pour ces mêmes catégories, Pôle emploi enregistre en octobre en données brutes 513 600 sorties. L’emploi bouge beaucoup plus qu’on pourrait le croire en lisant le sous-titre du Monde. Celui-ci participe de cette conception fantasmée de l’emploi comme un gâteau très stable, qu’il faudrait à tout prix empêcher de diminuer, notamment en limitant au maximum les licenciements économiques.
Justement, Pôle emploi signale dans son communiqué que le nombre de licenciements économiques est en augmentation de 12.7% en octobre. L’information, pourtant noyée dans les deux pages du communiqué, est reprise par la presse qui se focalise dessus, sans préciser qu’en nombre, cela ne représentent qu’une dizaine de milliers de personnes(12 400), moins que les entrées suite à une démission ou les plus de 130 000 fins de CDD. Sans préciser que ce nombre est en baisse par rapport à octobre 2011!
C’est ainsi que l’on se retrouve avec un ministre prêt à nationaliser les activités sidérurgique de Florange, dans l’idée de sauver un site menacé par la surcapacité en Europe. En réalité, la fermeture des hauts fourneaux de Lorraine était inscrite dès que les sidérurgistes ont investi à Fos sur mer et Dunkerque. La sidérurgie s’est installée à l'origine en Lorraine car on y exploitait le fer et le charbon. A partir du moment où on a cessé d’exploiter les gisements correspondants parce que trop chers ou épuisés, que l’on a décidé de construire les usines près des ports d’importation du fer et du coke, on savait que les hauts fourneaux lorrains étaient condamnés à terme, même si ce terme se comptait en plusieurs décennies (ce qui en passant laissait le temps de réfléchir à l’installation de nouvelles activités !).
La bataille du chômage ne se gagnera pas en nationalisant les Pétroplus ou les Florange, au contraire. Elle se gagnera en restaurant les marges des entreprises (cela risque d’être trop long avec la méthode décidée), en favorisant le lien entre entreprise et recherche, en évitant de sacrifier les entreprises efficaces sous prétexte qu’elles déplaisent aux écolos (oui, je pense ici au nucléaire !), en maîtisant la dépense publique et en évitant d’avoir une inflation supérieure à celle de ses voisins de la zone euro !
Elle ne se gagnera pas non plus en se trompant d’un facteur 14 sur la réalité des entrées à Pôle emploi, au risque d’en tirer des conclusions erronées !
PS : l'article en page 2 est à peine plus sérieux, puisqu'il note qu'il n'y a eu que 86 000 reprise d'emplois en octobre ce qui est le chiffre indiqué par Pôle Emploi, mais n'a guère de sens quand on sait qu'il y a 193 800 cessations d'inscriptions par défaut d'actualisation, sans compter les 37 600 radiations administratives et les 46 300 autres cas : l'un des problèmes de Pôle Emploi est que les chômeurs qui ont retrouvé un travail ne le préviennent pas souvent.
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