Ce samedi voit le MODEM élire ses instances départementales et nationales. Les débats internes ont beaucoup occupé le nouveau parti depuis sa création. Il devrait maintenant être en ordre de marche. Pour évaluer quelles sont ses chances de réussite, et après avoir analysé les racines du MODEM, regardons la personnalité de son chef et les premiers résultats obtenus avant d’analyser le calendrier électoral.
La constitution française met l’élection présidentielle au cœur du système d’accession au pouvoir. La capacité à présenter un candidat crédible à cette élection est donc un impératif pour tout parti qui se veut majeur. Les résultats du scrutin de 2007 ont montré qu’une part importante de français jugent F Bayrou crédible pour le poste. Au sein de son parti, son leadership n’est contesté par personne.
On doit cependant observer que beaucoup de ses amis l’ont quitté successivement depuis 10 ans. Quand il prend la tête de l’UDF en 1998, ce parti, bien qu’ayant perdu les élections en 1997, compte 118 députés . Le MODEM a aujourd’hui seulement 3 députés.
Les amis de A Madelin, de Démocratie Libérale, l’ont quitté en 1998 à propos de l’alliance avec le FN dans les régions. Puis ce sont Douste Blazy et d’autres, anciens du CDS comme lui, qui rejoignent l’UMP en 2002. Enfin, en 2007, la majorité du groupe UDF, qui l’avait soutenu dans sa campagne, soutient N Sarkozy au deuxième tour et rallie la majorité avec la création du Nouveau Centre. Depuis, on note les défections successives de JM Cavada et C St Etienne, un temps mis en avant comme leaders du MODEM.
Les résultats électoraux de l’UDF et de son président entre 2002 et 2007 peuvent indiquer que ceux qui l’ont quitté ont eu tort. A contrario, la logique électorale permettait de prévoir les défections de 2007. Les départs successifs, la manière dont F Bayrou a qualifié les partants de jolis noms (traîtres pour le moins) interroge cependant fortement sur sa capacité à travailler en équipe.
« Direct soir », gratuit parisien, consacre sa une de vendredi au leader du MODEM ainsi qu’un dossier assez complet. On y lit qu’aux municipales de 2008, le MODEM a fait autour de 16% dans les villes où il présentait des listes autonomes. Comme je l’avais analysé à l’époque, cela ne correspond pas à la réalité. Ce score est obtenu d’une part en ne prenant pas en compte les villes où le MODEM était absent, d’autre part en intégrant des villes (comme Arras) où un candidat MODEM dirigeait une liste d’union avec l’UMP.
On note quelques grandes villes où le MODEM seul réalise de beaux scores, au-delà de 18 ou 20%, parfois supérieurs au résultat de F Bayrou en 2007,comme Clermont Ferrand, St Etienne, St Nazaire ou Pau. Mais dans les plus grandes villes, le MODEM ne retrouve même pas les pourcentages obtenus par F Bayrou en 2002, quand il réalisait 6.85% au niveau national. Ce qui m’avait conduit à ce titre : le MODEM a-t-il déjà échoué ?
Le résultat des sénatoriales montre une très faible implantation du MODEM. Ce parti n’était présent que dans 9 des 36 départements métropolitains soumis à réélection. Il perd le siège de Philippe Arnaud, battu par le PS en Charente. Ailleurs, les résultats obtenus sont faibles, voire très faibles, comme dans les Alpes Maritimes où la liste MODEM recueille 33 voix sur 1787 exprimés. Dans les Côtes d’Armor par contre, le candidat MODEM vient en tête de l’opposition à la gauche majoritaire : il s’agit du maire de St Brieuc, élu en mars à la tête d’une liste d’union avec l’UMP.
Le Nouveau Centre, pourtant présent dans 5 départements seulement, s’en sort mieux avec un sortant réélu dans le Calvados, et deux sièges pris à l’UMP dans les départements de Sauvadet (Côte d’or) et de Morin (Eure et Loir).
Le MODEM semble donc avoir perdu une grande partie des élus de l’ex UDF. C’est un grave inconvénient pour la suite : on a vu avec les municipales, que ce sont les anciens cadres de l’UDF implantés localement qui faisaient de loin les meilleurs scores.
Les européennes constituent la prochaine échéance, en juin 2009. Ce scrutin est toujours présenté comme favorable au courant centriste, très pro européen. Les scores obtenus dans le passé ne confirment pas spécialement cet à priori. Les français ont plutôt l’habitude de se défouler lors de ces élections, qui ont historiquement et successivement profités à JM Le Pen, A Waechter, B Tapie, P Le Villiers et C Pasqua, D Cohn Bendit, sans qu’ils arrivent d’ailleurs à transformer ensuite les percées réalisées. Le MODEM peut cependant espérer profiter d’une faiblesse de l’UMP, due à l’impopularité du gouvernement ainsi que de l’éventuelle mauvaise image d’un PS englué dans les suites d’un congrès raté. Mais rien n’est joué à ce jour.
En 2010, pour les régionales, le MODEM risque d’être coincé entre les forces de droite et de gauche, et d’avoir la difficulté de devoir choisir ses alliances au second tour, si son score le lui permet.
On sait bien sûr que c’est 2012 que F Bayrou vise. Il espère qu’une victoire aux présidentielles se traduirait par une vague orange aux législatives, ce qui n’est pas impossible. Mais les français peuvent trouver qu’on l’a assez vu, puisqu’il a déjà été candidat deux fois. Contrairement à ce qu’affirmait Ségolène en parlant d’un socle de 17 millions de voix, les niveaux atteints précédemment ne sont jamais des acquis. JM Le Pen en a fait l’expérience l’an passé.
L’avenir du MODEM n’est pas fermé, mais la porte est étroite, très étroite.
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